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| Contes de France | |
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Lysisca Grande Louve
Nombre de messages : 5067 Age : 40 Localisation : Bonne question...Où suis-je? Famille : Date d'inscription : 21/04/2005
| Sujet: Contes de France Dim 10 Déc 2006, 17:37 | |
| La chèvre qui a pris le loup (conte traditionnel de l'Ile de France)
Conte de Seine-et-Marne, né, paraît-il, à Sammerron, Bezalles ou Chanteloup...
Biquette vivait heureuse au village ; on venait la traire chaque jour, le reste du temps elle batifolait sans soucis dans le pré où poussait de l'herbe grasse, juste en face de l'église. De temps à autre, les volailles de la basse-cour voisine caquetaient d'inquiétantes nouvelles : - Cot-cot, c'est comme je vous le dis, on a vu le loup dans les environs. - Le loup, juste ciel, qui vous en a parlé ? - Les voisines, au marché l'autre jour, lorsqu'on m'a vendue à votre fermière. Biquette écoutait, un instant apeurée, puis reprenait confiance. - Bah, ce ne sont que des rumeurs. Ce qui l'ennuyait, c'était le pieu fiché en terre qui retenait la longue chaîne fixée autour de son cou. Comment fuir, si le loup venait ? Bon, à force d'en parler, le loup finit par arriver. Un soir, Biquette entendit dans la basse-cour voisine en émoi, piailler, piauler, appeler au secours, chaque bête à sa façon... Elle n'eut pas longtemps à attendre, avant de voir surgir dans son pré le terrible ennemi, au corps maigre, aux yeux cruels, la gueule ouverte montrant ses dents pointues. Elle faillit défaillir, mais réagit tout de suite : elle tira sur sa chaîne de toutes ses forces, arc-boutée sur ses pattes. Le pieu résista, et le loup commença à se diriger vers elle, avec lenteur, comme s'il avait tout le temps devant lui, sans crainte de la voir fuir. - Bêê ! Elle eut beau bêler à pleine gorge, personne ne l'entendit... Elle redoubla d'efforts pour arracher son entrave de terre ; le loup avançait toujours. Soudain, la terre lâcha prise, le piquet sauta en l'air, Biquette se sentit libre. Aussitôt, elle s'enfuit. Le loup bondit derrière ; Biquette savait qu'en quelques bonds il l'aurait rejointe. Par bonheur, soudain, l'église se dressa devant elle ; elle vit la porte, s'y engouffra, le loup sur les talons de ses sabots. Ce fut une belle poursuite parmi les bancs remués, le chemin de croix parcouru dix fois... La chèvre s'essoufflait, le loup heureusement s'accrochait les pattes à la chaîne et au pieu qui traînaient à la suite de la fuyarde. À la fin, Biquette n'en pouvait plus. D'un dernier effort désespéré elle sauta dehors. Le piquet s'accrocha au battant de la porte ouverte. Et celui-ci par une chance folle, se referma sur le loup, coinçant sa tête entre le bois et le mur. Le loup hurla, Biquette se tourna, arrêtée dans son élan. Elle vit le loup prisonnier, elle tira plus fort encore sur sa chaîne. Du coup, le loup, à moitié étouffé, ne put que se taire, les yeux exorbités. Biquette Biquette sans lâcher prise bêla, et bêla encore, jusqu'au moment où ses cris désespérés firent enfin accourir les villageois qui mirent le loup à mal. Ainsi le faible eut raison du fort. De plus, Biquette gagna la considération respectueuse des pensionnaires de la basse-cour voisine. | |
| | | Lysisca Grande Louve
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| Sujet: Re: Contes de France Dim 10 Déc 2006, 17:37 | |
| La messe des loups (conte traditionnel de Gascogne)
Les loups sont des bêtes comme les autres. Ils n'ont pas d'âme. Pour eux, tout finit juste au moment de la mort. Cependant, une fois chaque année, les loups du même pays s'assemblent pour entendre la messe. Cette messe est dite par un curé-loup, qui a appris son métier je ne sais où. Le curé-loup monte à l'autel, juste à l'heure de minuit du dernier jour de l'année, qui est la fête de Saint-Sylvestre. On dit qu'il y a aussi des évêques-loups, des archevêques-loups, et un pape-loup. Mais nul ne les a jamais vus. Pour les curés-loups, c'est une autre affaire. Vous allez en avoir la preuve. Il n'y a guère longtemps, à Mauvezin, un brave homme faisait le métier de charron. L'un de ses fils travaillait avec lui comme apprenti. Un soir, après souper, le père dit au garçon : - Mon ami, tu as aujourd'hui vingt et un ans sonnés. Tout ce que j'étais capable de t'enseigner, tu le sais maintenant aussi bien que moi. Voici le moment de t'établir à ton compte. Fais courir l'oeil, et tâche de bien choisir où tu dois aller. Une fois achalandé, tu n'auras pas de peine à te marier. - Père, vous avez raison. Il est temps de m'établir à mon compte. Quant à me marier, il y a longtemps que j'y pense. Ma maîtresse demeure à Monfort. C'est une fille belle comme pas une, et honnête comme l'or. J'irai donc m'établir charron à Monfort. Sept jours après, le jeune homme avait fait comme il avait dit, et les pratiques ne lui manquaient pas. Sept mois plus tard, il épousait sa maîtresse. Tous deux vivaient heureux et tranquilles, comme des poissons dans l'eau. Un soir d'hiver, sept jours avant la Saint-Sylvestre, le charron et sa femme étaient en train de souper, quand ils entendirent le bruit d'un cheval lancé au grand galop. Le cheval s'arrêta devant la porte de leur maison. - Ho ! Charron ! Ho ! Charron ! cria le cavalier. Le charron ouvrit la fenêtre, et reconnut un de ses amis de Mauvezin. - Que me veux-tu, mon ami ? - Charron, je t'apporte de mauvaises nouvelles. Ton père est malade, bien malade. Si tu veux le voir encore en vie, tu n'as que le temps de partir pour Mauvezin. - Merci, mon ami. Je pars sur-le-champ. Descends de cheval, et viens boire un coup. - Merci, charron. J'ai des affaires pressées ailleurs. Le cavalier repartit au grand galop, et le charron s'en alla trouver aussitôt le devin de la commune. - Bonsoir, devin. - Bonsoir, charron. Je sais pourquoi tu es ici. Ton père est bien malade, bien malade. Sois tranquille, il ne mourra pas. Mais il souffrira comme un damné de l'enfer, jusqu'à ce qu'il ait avalé le remède qu'il lui faut. Ce remède est la queue d'un curé-loup, que ton père mangera tout entière, avec le poil, la peau, la chair, les os, et la moelle. Veux-tu faire ce qu'il faut, pour avoir cette queue de curé-loup ? - Devin, je le veux, et je te paierai ce qu'il faudra. - Quand ton père sera près de guérir, je me paierai de mes mains, et sur tes oreilles. Cela dit, le devin changea le charron en loup, qui sur-le-champ partit au grand galop pour la forêt de Boucone. Les loups le reçurent dans leur bande. Pendant six jours et six nuits, il les aida à voler des veaux et des brebis. Le dernier jour de l'année, qui est la fête de Saint-Sylvestre, les loups furent avisés d'avoir à se procurer un clerc, pour servir la messe de minuit, qu'un curé-loup devait dire au beau milieu de la forêt de Boucone. Alors, les loups se dirent les uns aux autres : - Qui de nous est en état de servir de clerc ? - Moi, répondit le charron. - Eh bien, frère, tu feras ton métier. Une heure avant minuit, le charron avait préparé, au beau milieu de la forêt de Boucone, un autel avec des cierges allumés. Devant l'autel, les loups attendaient le curé-loup, qui arriva tout habillé pour dire la messe, juste à l'heure de minuit. La messe commença donc, et le charron la servit jusqu'au dernier évangile. Alors, les loups s'enfuirent au grand galop, de sorte qu'il ne demeura plus que le curé-loup et son clerc. - Attends, curé-loup. Je vais t'aider à te déshabiller. Le charron s'approcha par-derrière du curé-loup, et, d'un grand coup de gueule, il lui coupa la queue ras du cul. Le curé-loup partit en hurlant. Aussitôt, le charron se trouva porté, sans savoir comment, dans la maison du devin de Monfort. - C'est toi, charron. Regarde-toi dans ce miroir. Le charron se regarda dans le miroir. Il était redevenu homme. Mais il avait encore les oreilles d'un loup, et tenait serrée entre ses dents la queue du curé-loup. - Charron, voici le moment de me payer de mes mains, et sur tes oreilles. Le devin arracha les deux oreilles de loup du charron. Aussitôt, deux oreilles de chrétien repoussèrent à la place. - Et maintenant, charron, tu as de quoi guérir ton père. - Merci, devin. Le charron partit vite pour Mauvezin, et fit manger à son père toute la queue du curé-loup, avec le poil, la peau, la chair, les os, et la moelle. Aussitôt, le malade fut guéri, et il vécut encore bien longtemps. | |
| | | Lysisca Grande Louve
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| Sujet: Re: Contes de France Dim 10 Déc 2006, 17:38 | |
| Le loup et les biquets (conte traditionnel de la Normandie)
La Chèvre eut un jour besoin d'aller à la ville vendre son beurre et son fromage. « Dès que je serai dehors, dit-elle à ses biquets, fermez bien la porte au verrou et n'ouvrez que si l'on vous montre patte blanche. » Les biquets promirent d'obéir, et la mère les embrassa et les quitta. Comme elle passait près du bois, compère le Loup l'aperçut. « Tiens, la Chèvre qui s'en va à la ville ! Ses biquets doivent être seuls au logis. Si je pouvais les croquer, cela tomberait bien, il y a deux jours que je n'ai pas mangé. » Et le Loup alla frapper à la porte de la Chèvre. Pan, pan, ouvrez ! dit-il en contrefaisant la voix de cette dernière. - Qui est là ? - C'est moi, votre mère, qui reviens du marché. - Montrez patte blanche et nous vous ouvrirons. - J'ai oublié mon panier ; Je vais revenir, dit le Loup en se grattant la tête. » Puis il alla trouver le compère Renard et lui exposa l'affaire. « Ce n'est que cela ? j'ai là un sac de farine, trempez-y votre patte et tout sera dit. - Tu as raison, l'ami, les biquets seront bien attrapés ! » Sa patte blanchie, le Loup alla frapper à la porte de la Chèvre. « Pan, pan, ouvrez ! - Qui est là ? - Votre mère, la Chèvre. - Montrez-nous patte blanche et nous vous ouvrirons. » Le Loup passa la patte sous la porte mais dans le chemin, la farine était partie et la patte était noire. Les biquets refusèrent d'ouvrir. Le pauvre compère retourna demander avis au Renard. « Ami, déguise-toi en pèlerin, pour sûr qu'on t'ouvrira. - Mais des habits ? - J'en ai là de vieux ; je vais te les donner. » Le Renard habilla le Loup qui pour la troisième fois alla frapper à la porte de la cabane. La Chèvre était revenue et les biquets lui avaient raconté ce qui était arrivé en son absence. « Vous avez bien fait de ne pas ouvrir, c'était sans doute le Loup qui venait pour vous croquer. S'il revient, il me le paiera, allez ! » Et la Chèvre prit une botte de paille et un fagot et les mit dans la cheminée. En ce moment le Loup revenait. « Pan, pan, ouvrez ! - La porte est fermée et notre mère est à la ville avec la clef. Nous ne pouvons ouvrir. Mais qui êtes-vous ? - Un pauvre pèlerin qui revient de Jérusalem. - Nous regrettons bien... mais vous pourriez passer par la cheminée. - C'est une bonne idée ! dit le Loup. » Le compère grimpa sur le toit et de là descendit dans la cheminée. Aussitôt la Chèvre alluma la paille et le fagot et le malheureux Loup tomba mort dans le foyer. La mère et ses biquets le prirent et le jetèrent noir comme boudin dans la rivière voisine.
Henry Carnoy, Contes français, 1885 | |
| | | Lysisca Grande Louve
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| Sujet: Re: Contes de France Dim 10 Déc 2006, 17:39 | |
| Le Loup, la Chèvre et ses Chevreaux (conte traditionnel d'Auvergne)
C'est dans les bois de La Vayssière, près de Saint-Jean, département du Cantal, que vivaient jadis le loup, la chèvre et ses trois chevreaux. Or donc, chevrette et ses petits chevreaux vivaient tranquilles dans le bois où ils occupaient une solide maisonnette qui les mettait à l'abri des méchants. Maman chevrette vaquait à ses occupations du matin au soir, surtout préoccupée de ramener aux enfants de l'herbe et des feuilles bien fraîches. Mais voilà qu'un jour, elle glisse sur un rocher, tombe et se casse la jambe ! Oh, quelle douleur... Chevrette sur trois pattes, se traîne jusqu'à la maison. Les enfants pleurent. - Calmez-vous, mes petits, ce ne sera rien. Il faut absolument que j'aille à Saint-Jean voir le docteur qui va me guérir. - Oui, maman. - Restez sages en m'attendant. Vous avez du foin dans la grange, du miel et de l'eau en suffisance. Surtout n'ouvrez à personne si l'on frappe à la Porte. Quand je reviendrai, je chanterai une chanson pour que vous puissiez me reconnaître. - Oui, maman. - Je chanterai : « Ouvrez à petite maman Qui est reine de Saint-Jean Sa patte bien raccommodée Avec du fil d'argent doré. » - Oui, maman. Au revoir, maman. Guéris vite ! Clopin-clopant, chevrette s'en va vers la ville. Elle ne se sent pas tranquille, et elle le serait encore moins si elle savait que le loup avait entendu sa chanson, caché sous la fenêtre de la maisonnette... Lorsque la chèvre disparaît à l'horizon, le loup se pourlèche les babines, se glisse vers la maison des chevreaux sans attendre, frappe à la porte. Il chante : « Ouvrez à petite maman... » Les trois chevreaux entendent ; ils sont surpris que leur mère revienne si vite, mais surtout par le son de sa voix. - Tu n'es pas notre maman ! crie l'un des chevreaux, maman a la voix bien plus douce. - Mais non ! - Mais si ! Le loup insiste, puis s'en va, tout penaud, voyant qu'on ne lui ouvre pas. Il rencontre le renard, à qui il raconte sa mésaventure. - Il faut te faire aplatir la langue, conseille le renard. Ainsi ta voix sera moins grosse. - Si tu le crois, soupire le loup... Aide-moi, s'il te plaît. Le loup tire la langue, la pose sur une pierre plate. Renard attrape une autre pierre et frappe dessus d'un grand coup. Le loup hurle de douleur, se sauve sans même penser à dire merci à son compagnon. Dans le bois, il va tremper un bon moment sa langue dans l'eau froide du ruisseau. Une fois sa douleur calmée, il retourne à la maisonnette de la chèvre, frappe à nouveau à la porte, et chante : « Ouvrez à petite maman, Qui est revenue de Saint-Jean... » Les chevreaux, en l'entendant, hésitent, se consultent : - C'est maman chevrette ! - Mais non, écoutez bien, les frères : sa voix n'est pas la même ! - Elle est moins grosse que celle de tout à l'heure, pourtant. - Ce n'est pas maman, je vous dis ! C'est peut-être le loup... Les trois chevreaux, apeurés n'ouvrent pas cette fois non plus. Le loup n'a plus qu'à s'en aller. Dans la forêt, il rage et réfléchit des journées durant. D'un côté, il rêve de croquer les trois chevreaux bien tendres ; d'un autre côté, il a peur de se faire encore aplatir la langue. Mais quelle autre solution trouver ? Le loup va donc chez le forgeron du village, explique ce qu'il attend de lui. - Installe-toi, dit l'homme. En tremblant, le loup étale sa langue sur l'enclume, le forgeron lève son lourd marteau, frappe de toutes ses forces. Le loup hurle si haut cette fois, que tout le village en tremble. Il doit rester longtemps la tête dans l'eau courante du bois pour que son mal se dissipe un peu. Ensuite, il court vers la maisonnette de madame Chevrette. « Ouvrez à petite maman, chante-t-il d'une voix devenue douce. Qui est revenue de Saint-Jean. Sa patte bien raccommodée. Avec un fil d'argent doré. « Les chevreaux crient de joie : - Maman est de retour ! - Tire vite le verrou, , toi. - C'est ce que je suis en train de faire. La porte s'ouvre, le loup gronde, s'élance ! Les trois chevreaux n'ont que le temps de se cacher n'importe où, le premier dans la huche à pain, le deuxième sous le lit, le troisième dans la boîte de la grosse horloge, tous les trois morts de peur. Le loup s'en moque, il prend tout son temps maintenant, il sait qu'il va les attraper sans peine, les manger l'un après l'autre. Ah, non, il ne regrette plus de s'être fait aplatir la langue. Bon, assez attendu... Le loup regarde d'un oeil gourmand le petit chevreau blotti sous le lit. C'est par lui qu'il va commencer son repas. Il approche, avance, la gueule ouverte, saisit le chevreau par la queue. Soudain, un grand coup le renverse. Chevrette est revenue de Saint-Jean, guérie ! Elle a vu ses enfants en danger, elle attaque le loup, à grands coups de cornes ! - Attrape ! Attrape encore ! Le loup dégringole à terre, la chèvre frappe et frappe sans répit. Elle frappe tant que le loup s'enfuit. Dans son désarroi, il s'engouffre dans la cheminée où il s'écorche, grimpe sur le toit, saute dans le jardin, se précipite à l'abri des grands arbres. Non, il n'est pas prêt de revenir ! Maman chevrette serre ses enfants sur son coeur, tout heureuse, et console celui qui était caché sous le lit, et à qui le loup a avalé le bout de la queue. | |
| | | Lysisca Grande Louve
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| Sujet: Re: Contes de France Dim 10 Déc 2006, 17:39 | |
| Le Loup-Garou (conte traditionnel d'Auvergne)
Le conte qui suit n'est pas situé géographiquement. On le disait par toute l'Auvergne.
Ceci n'est qu'un conte ; faites attention pourtant, si vous passez la nuit dans le bois de Font-Sainte, près du village de Laquérie, commune de Saint-Amandin, non loin de Condat... - N'y va pas, dit la femme du sabotier. - Faut pourtant, lui répondit son mari, Michel. La Catou, elle n'est pas bien du tout. On dirait qu'elle n'a plus sa tête à elle. Il s'enveloppa de son manteau, vérifia si son couteau était dans sa poche, puis ouvrit la porte. Dehors, la nuit couvrait la campagne d'une chape noire ; on distinguait mal la haie, ou les arbres, seulement des masses sombres. - Ne t'inquiète pas. Michel attrapa le chemin et s'en fut, en direction de Condat, en quête du médecin pour la voisine malade. Au début, il ne s'en fit pas trop. C'est seulement en arrivant dans le bois qu'il sentit un certain malaise s'infiltrer en lui... En effet, le bois de Font-Sainte était réputé comme étant le domaine de monsieur Ropotou, le diable. Il vivait là, en compagnie de diablesses, de sorcières, de fantômes, de loups-garous, et d'autres suppôts de l'enfer. Bien des légendes couraient à ce sujet. Ainsi, on disait que tous les premiers vendredis du mois, se tenait dans le bois le marché aux âmes. Il fallait s'y rendre avec une poule noire, et le diable apparaissait, déguisé en gentilhomme. - Combien voulez-vous pour cette poule ? demandait-il. On discutait, on marchandait, et on finissait par se mettre d'accord. Le lendemain, on revenait au bois, un carrosse vous attendait pour vous mener au château diabolique, signer le pacte officiel... Toujours d'après les ouï-dire, ces pactes-là pouvaient comporter des clauses bien particulières... Le sabotier marchait toujours en se rappelant toutes ces choses. Et c'est en arrivant au carrefour des Quatre-Chemins que le loup-garou lui apparut sous la lune, noir, difforme, effrayant avec ses yeux brillants et ses longues dents pointues. Michel s'arrêta net. Une voix caverneuse se fit entendre : - Je veux ton âme pour mon maître... - Pas question répliqua le sabotier. - Prends garde ! La main du sabotier se crispa sur son couteau. Il savait que les loups-garous sont insensibles aux balles de fusil, comme à la morsure des chiens, mais, en revanche, si une lame d'arme blanche arrivait à trouer leur peau, ils redevenaient aussitôt un homme et une femme. Le loup-garou gronda sauvagement, et bondit vers lui pour le prendre à la gorge. Michel fut le plus rapide : son bras se détendit, son couteau frappa la bête. Le grondement se termina en plainte. Le loup-garou tomba à terre, prenant en même temps forme humaine. Avec un grand étonnement, le sabotier reconnut un voisin, maître Garaud, le meunier, allongé, pitoyable, l'épaule ensanglantée... - Tu as fait de la mauvaise ouvrage, gémit le meunier en grimaçant, me voilà dans de beaux draps maintenant. Le sabotier haussa les épaules. L'autre raconta son histoire : neuf années auparavant, son commerce marchant mal, il avait signé un pacte avec monsieur Ropotou. En échange d'une belle somme, il était chargé de trouver des âmes pour le diable. L'affaire marchait bien, les pratiques ne manquaient pas : - Tiens, hier encore j'ai réussi à convaincre la Catou... - Ça alors ! Voilà pourquoi la pauvrette est toute retournée. - On s'habitue, ne t'inquiète pas pour elle... Je te disais donc, Michel, qu'il ne me restait qu'un an pour arriver au bout de mon contrat, mais voilà que tu as tout gâché, et demain je serai obligé de livrer ma propre fille au diable en compensation de mon échec de cette nuit, c'est écrit, j'ai signé... - Toinette ? - Eh oui, je l'ai pourtant promise à José, le forgeron, un brave garçon. - Attends, attends, meunier, on va essayer d'arranger tout ce gâchis. - Ça ne sera point facile. Le sabotier aida maître Garaud à se remettre sur pied, le soutint, et ils reprirent tous les deux le chemin du village, sans plus s'occuper du médecin pour la Catou, que Michel comptait bien guérir d'une autre façon. Le lendemain, il y eut une grande discussion à l'église, entre le curé, son sacristain, José le forgeron, et, bien entendu, Michel et le meunier. Toutes les dispositions furent prises, et toutes les prières dites au préalable. La nuit venue, le meunier partit en direction du bois, pâle et mal à l'aise, une lanterne à la main, suivi de sa fille Toinette. Derrière eux, marchaient les autres, c'est-à-dire, le sabotier, le forgeron et le sacristain ; tous les trois se dissimulaient derrière les taillis et les arbres... Le groupe arriva ainsi aux Quatre-Chemins. Maître Garaud leva sa lampe, et maître Ropotou lui apparut planté sur ses pieds fourchus au beau milieu du carrefour, vêtu de son habit de gentilhomme, un rictus sardonique à la bouche. - Hé, hé, fit le diable. C'est bien, tu m'amènes ta fille pour réparer ta maladresse, je ne perds pas au change, mais c'était convenu. Viens, Toinette. Le diable avança, tendant le bras, prêt à saisir la jeune fille et à l'attirer vers un gouffre profond, tout proche. Mais à ce moment, Michel et le forgeron, un rude gaillard, musclé, large d'épaules, bondirent sur le démon, lui passèrent en un instant autour du cou une corde solide, tandis que le sacristain commençait à l'asperger d'eau bénite, dont il avait emporté une ample provision. Ropotou hurla, se tortilla, essaya en vain de se dépêtrer de sa cravate de chanvre. Les compères n'en serraient que davantage, et Ropotou se tut bientôt, la langue pendante jusqu'au ventre. - Démon, gronda le sabotier, il faut que tu annules ton pacte avec maître Garaud. - Ja... jamais... de la vie... Ce qui... est écrit... est écrit... - Serre encore, forgeron. L'autre obéit, le diable eut un long gémissement, ou plutôt un râle. - Alors, tu annules, oui ou non - J'a... j'annule. Ropotou ne pouvait faire autrement ; le curé avait préparé un acte en bonne et due forme, que le meunier tira de sa blouse. En vertu de ses clauses, non seulement le meunier était dégagé de ses obligations envers le démon, mais encore, ce dernier rendait leurs âmes à toutes les malheureuses victimes du loup-garou Garaud, la Catou comprise, bien entendu. Le diable signa, les autres lâchèrent la corde. Comme le sacristain continuait à l'asperger d'eau bénite, le démon s'enfuit, ivre de colère. Au village de Laquérie, on célébra bientôt le mariage de Toinette et de José, avec force coups de fusil tirés en l'air lorsque les mariés sortirent de l'église, et on dansa joyeusement la bourrée au son des vielles et des cabrettes. | |
| | | Lysisca Grande Louve
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| Sujet: Re: Contes de France Dim 10 Déc 2006, 17:40 | |
| Le renard et le loup (conte traditionnel de l'Ile de France)
Le renard appartient au folklore de la région parisienne au moins depuis le Moyen Âge. (Une preuve en est, par exemple, qu'on situe son repaire à Mauperthuis, non loin de Melun, dans le célèbre Roman de Renart). Le conte qui suit est pourtant un des rares contes d'animaux recueillis dans notre région d'Ile-de-France.
Pour une fois, le loup et le renard étaient tombés d'accord. Ensemble ils se mirent à l'affût et sautèrent sur la première chèvre qui commit l'imprudence de s'écarter du troupeau. La pauvrette n'eut même pas le temps de pousser un bêlement avant de passer de vie à trépas... - Mangeons-la tout de suite, dit le loup glouton. - Mais non, rétorqua le renard, on va la faire cuire chez toi, elle n'en sera que meilleure. - D'accord. Dans le repaire du loup, ils placèrent un chaudron sur le feu, avec la chèvre dedans... Le pot-au-feu se mit bientôt à bouillir, si bien que le loup s'en pourléchait les babines à l'avance. Devant la mine de son compère, Renard ne put résister à l'envie de lui jouer un tour à sa façon : - Passe donc l'écumoire, lui dit-il, moi je n'y vois pas trop clair. Le loup prit l'ustensile de cuisine, se pencha au-dessus du chaudron. Alors, hop, d' d'une poussée vigoureuse, Renard le précipité dans la soupe bouillante, avant de s'enfuir, tout réjoui d'entendre l'autre hurler de douleur. Le loup réussit à s'extirper du chaudron ; il lui fallut huit jours pour guérir de ses brûlures. Le neuvième, il sortit de chez lui... et rencontra le renard, vers qui il se précipita, l'accusant avec véhémence de l'avoir malmené. Le renard se défendit, raconta qu'il ne s'était rendu compte de rien ; et s'il avait quitté le repaire du loup, c'était pour laisser à son compagnon la chèvre tout entière : - Tu comprends, je n'avais plus faim tout à coup... Bref, il en dit tant qu'il embrouilla son compagnon : - Faisons la paix, proposa-t-il pour conclure, et allons chercher une autre chèvre à croquer. - Je te pardonne, dit le loup. Et j'accepte. Ainsi fut fait, une deuxième chèvre attrapée, emportée, jetée dans la marmite au repaire du loup. Mais, à nouveau, le renard ne put s'empêcher d'y précipiter aussi son compagnon lorsque ce dernier entreprit d'écumer la soupe. Il s'enfuit ensuite comme la première fois, riant plus fort encore. Au neuvième jour qui suivit, le loup rescapé, bien que toujours endolori, rencontra à nouveau son bourreau sur le chemin ; cette fois, en se précipitant vers lui, il se fit menaçant : - Je t'ai vu ! cria-t-il. Gare à toi, je vais te faire passer le goût des méchantes plaisanteries ! Renard recula, se défendit comme il le put : - Je ne sais pas ce qui m'a pris, gémit-il, je n'avais pas ma tête à moi, tu sais, j'ai des ennuis de famille. À nouveau, devant le discours du rusé, le loup finit par pardonner, à nouveau une chèvre paya de sa vie leur réconciliation... Chez le loup, le renard essaya de résister à la tentation. Mais lorsqu'il vit pour la troisième fois le loup écumer la soupe sans méfiance, rien n'y fit : pour la troisième fois, le loup tomba dans le chaudron ! Seulement, le neuvième jour, lorsque le loup put sortir de son repaire et qu'il rencontra le renard, plein de furieuse colère, il ouvrit la gueule, ses dents pointues étincelèrent au soleil. Pas question de l'écoutez ! Renard frémit devant le danger : - Attends, supplia-t-il, s'il te plaît, avant de me mettre à mal, laisse-moi d'abord aller à la messe. Que les portes du Paradis me soient au moins ouvertes ! - J'accepte, gronda le loup frémissant d'impatience. Mais je t'accompagne. Tu ne perds rien pour attendre. À l'église, maître renard fit semblant de prier, le loup somnolait à ses côtés, mais seulement d'un oeil. Enfin le renard eut une idée : il regarda autour de lui, l'air ennuyé. - Qu'as-tu ? demanda le loup, intrigué par son manège. - Le sonneur n'est pas là, répondit le renard. Comment annoncer au monde que je fais pénitence ? Rends-moi ce service, compagnon, sonne la cloche à sa place. - Je ne sais pas le faire. - Mais si, c'est facile, regarde. En un instant le rusé compère attacha la corde de la grosse cloche de l'église à la queue du loup et tira dessus de toutes ses forces. La cloche s'ébranla, le loup se sentit soulevé de terre, queue en l'air et tête en bas. Arrivé à bonne hauteur, il retomba rudement au sol, avant de repartir encore vers le sommet du clocher, meurtri et affolé, criant à pleine gorge ! Renard riait comme un moine un jour de festin en regardant le pendu aller et venir dans les airs. Mais il cessa de rire lorsque le loup réussit à se dégager, grâce à un effort désespéré, et se précipita vers lui, les yeux féroces. Là, il sentit sa dernière heure venue. - Pitié ! gémit-il. Je comprends ta colère ! Avant de mourir accepte pourtant que je revoie une dernière fois ma femme et mes pauvres enfants, que je rédige aussi mon testament. S'il te plaît... Le loup se laissa fléchir, tout en conservant son air cruel, et en répétant d'un ton résolu : - Tu ne perds rien pour attendre ! Ils sortirent de l'église et s'en allèrent dans la forêt de Malvoisine, où se trouvait le terrier du du renard. Bien entendu, celui-ci avait une idée en tête. Lorsqu'ils furent à proximité de son gîte, il s'élança soudain vers le trou d'entrée et disparut sous terre. Le loup se précipita à sa suite, mais ne put entrer, le passage étant trop étroit pour lui ! Fou de rage, il hurla, courut, sauta de tous côtés. L'autre, maintenant bien à l'abri dans sa maison, se mit à rire de bon coeur. Le loup finit par se calmer. Ne voulant pas s'avouer vaincu, il menaça : - Attends que je ramasse du bois, je t'enfumerai ! - Merci, cria le renard, fais du feu, d'accord, j'ai justement un peu froid. Le loup réfléchit : - Je vais plutôt t'inonder; l'Yerres est proche, il me suffira de creuser un brin pour en détourner le cours. - D'accord, approuva le renard, ne te gêne pas. Qu'il y ait beaucoup d'eau, j'ai grand soif. Le loup gronda de contrariété, mais il n'était pas encore à bout de ressources. - Je vais t'envoyer des pierres sur la tête ! - Jette, jette donc, les pierres me seront utiles, il me faut encore monter un mur pour finir ma maison. Cette fois, le loup ne sut plus que répondre, et c'est le renard qui le conseilla : - Allons, compère, si tu veux entrer chez moi, passe donc par la cheminée. Elle se trouve tout à côté du grand chêne, , à ta droite... Le loup se dit que le renard était bien sot de lui montrer ainsi le chemin. Il s'avança, découvrit l'extrémité de la cheminée à l'endroit dit, cachée dans les herbes hautes. Babines retroussées, il sauta sans hésiter.. et aboutit en plein dans une marmite emplie d'eau sur laquelle retomba le couvercle. Le feu se mit à crépiter, et c'est ainsi que le renard, faute d'avoir mangé trois moitiés de chèvre, mangea un loup tout entier. | |
| | | Lysisca Grande Louve
Nombre de messages : 5067 Age : 40 Localisation : Bonne question...Où suis-je? Famille : Date d'inscription : 21/04/2005
| Sujet: Re: Contes de France Dim 10 Déc 2006, 17:41 | |
| Les bêtes du meunier et les loups (conte traditionnel de la Picardie)
Entre Harponville et Warloy était bâti autrefois un moulin qui appartenait à un batteur d'huile vieux comme les rues et pauvre à rendre des points à Lazare. Depuis longtemps le moulin s'était détraqué et l'on n'apportait plus les oeillettes des environs pour en faire extraire l'huile. Pas d'ouvrage, pas d'argent, pas d'argent, pas de pain et misère complète. C'était le chemin qu'avait suivi le vieux Michel. Ce qui lui faisait le plus de peine dans sa détresse, c'était de ne pouvoir nourrir comme par le passé son âne, son chat, son chien, son coq et son canard qu'il aimait plus que lui-même. Aussi un jour, il ouvrit la porte de sa cabane et mit tous ses animaux en liberté. Mes pauvres bêtes, dit-il, il n'y a plus de foin pour l'âne à l'écurie, je n'ai pas de pain pour le chien et le chat, pas d'orge pour le coq et le canard, je ne veux pas vous laisser mourir de faim ; le bois de Vadencourt est proche ; vous y trouverez un abri pour la nuit et sans doute la nourriture qui vous est nécessaire. » Le batteur d'huile était bien triste de perdre ses bêtes, et ses bêtes étaient bien peinées de quitter leur vieux maître. Enfin, après force pleurs et adieux de chaque côté, le batteur d'huile ferma la porte et les animaux s'éloignèrent. Ils arrivèrent dans le bois auprès d'une cabane où étaient une dizaine de loups. « Quoi faire ? se demandèrent les bêtes du meunier. - Si vous m'en croyez, dit l'Ane, nous allons nous mettre à pousser chacun quelques éclats de voix, après nous être cachés dans un buisson. Nous ferons sauver les loups et nous aurons la cabane pour y passer la nuit. - C'est cela ! C'est cela ! dirent les animaux. » Et aussitôt ils s'enfoncèrent dans un fourré et chantèrent chacun à sa façon. « Hi! Han ! hi ! han ! fit l'Ane d'une voix de tonnerre. - Miaou ! Miaou ! fit le Chat. - Aou ! Aou ! Aou ! dit le Chien. - Coquiacou ! Coquiacou ! éclata le Coq. - Can ! Can ! Can ! Can ! ajouta le Canard. Effrayés de ce vacarme épouvantable, les loups, croyant avoir mille légions de diables à leurs trousses, quittèrent la maison et s'enfuirent tout au loin. Bien joyeuses les bêtes du moulin entrèrent dans la cabane et mangèrent à la santé des loups d'un excellent repas préparé par ces derniers. Lorsqu'ils eurent bien mangé, ils songèrent à se reposer. L'Ane se coucha près de la porte, le Chat sur l'armoilette, le Chien sur le fumier de la cour, le Coq sur la cheminée, le Canard sur le buffet. Les loups étaient enfin revenus de leur frayeur. Ils chargèrent un des rusés de la bande d'aller en éclaireur voir par lui-même quelle était la cause du concert qui les avait interrompus dans leur fête. Le Loup partit, fouilla partout et arriva à la maison. N'entendant aucun bruit, il entra. L'Ane l'apercevant lui envoya un grand coup de pied en passant ; le Chat lui donna un coup de griffe, le Coq lui fit c... dans l'oeil, le Canard poussa un formidable can ! can ! et comme il passait près du fumier en se sauvant le Chien lui mordit la cuisse. Retourné auprès de ses compagnons et interrogé par eux, le Loup raconta qu'une bande nombreuse de gens s'était établie dans la cabane. « Jugez-en, ajouta-t-il ; en entrant, un forgeron m'a donné un coup de marteau, un savetier m'a piqué d'un paquet d'alênes, un maçon réparant la cheminée m'a jeté du mortier dans l'oeil, et comme je m'échappais, un journalier m'a frappé d'un coup de fourche, tandis qu'un autre homme criait à tue-tête : Attends ! Attends ! » Plus épouvantés que jamais, les loups se sauvèrent bien loin et ne revinrent jamais au bois de Vadencourt. Le lendemain, le Chat trouva la bourse des loups et, de compagnie, nos cinq animaux allèrent la porter à leur vieux maître, le batteur d'huile du moulin, avec qui depuis ce jour ils vécurent heureux, mangeant à discrétion et s'égaudissant fort lorsque l'Ane ou le Canard faisait le récit de la journée passée dans le bois de Vadencourt, à la cabane aux loups.
Henry Carnoy, Contes français, 1885
Source : http://www.logoslibrary.eu/pls/wordtc/new_wordtheque.w6_context.more_context?parola=0&n_words=1&v_document_code=36214&v_sequencer=86047&lingua=fr | |
| | | Yellowstone Lycanthrope Membre
Nombre de messages : 3488 Age : 36 Localisation : Territoire des Lycans Famille : Date d'inscription : 21/04/2005
| Sujet: Re: Contes de France Sam 15 Sep 2007, 18:56 | |
| Femme ou louve... la légende de la loba
On la nomme aussi La Huesera (la Femme aux Os) La Trapera (la Ramasseuse), elle symbolise pour nous l’énergie "sauvage".
La loba archétype de la femme sauvage, appartenant à la seignerie des loups, symbolise le ressourcement et la reconnaissance a pour tâche de ramasser des os en arpentant les montagnes et les lits de rivières asséchés, c’est pourquoi on raconte que si vous errez dans le désert au coucher du soleil, vous avez de la chance, car LA LOBA peut vous prendre en sympathie et vous montrer quelque chose...quelque chose qui appartient à l’ÂME.
C’est au moyen âge qu’ un troubadour de haute et bonne réputation dans les cours de fine amour qu’il fréquentait assidûment s’est retrouvé piégé en commettant certaines folies dignes d’être rapportées. La gente dame qui avait percé son coeur était loin d’être n’importe qui, il s’agissait de la Louve de Pennautier dite Loba. Loba était de haut lignage, également célèbre pour les fêtes qu’elle donnait et la mélancolie paradoxale qu’elle affichait depuis que Trencavel de Carcassonne l’avait blessée, en ne faisant aucun cas des faveurs qu’elle lui promettait. Ce troubadour déguisé ainsi en loup tenta de se rapprocher incognito du château de Puivert dans lequel se trouvait Dame Louve et ou personne ne l’attendait. Bien entendu, on l’aperçut et il se fit donner la chasse par les paysans et les soldats de Jourdain de Cabaret mari de la Dame et pourtant connu pour sa tolérance. Le compte finit cette chasse sérieusement blessé et bastonné. Il ne se tira de l’affaire qu’en amadouant par son verbe ceux qui le frappaient. On dit, qu’il fut soigné avec tendresse par Loba dans le château. Cet épisode se déroula quelque temps avant que la belle ne devint la maîtresse du Comte de Foix et ne lui donna un fils issu de lui ou du trouvère qu’elle s’empressa d’appeler Loup.
Ce conte, nous fait bien voir qu’il suffisait de se vêtir d’une peau de loup pour être pourchassé sans relâche et que finalement à l’époque, c’est entre loups qu’on s’entendait le mieux. Pourquoi donc la Loba soigna tendrement ce troubadour ? | |
| | | Viviane Lycanthrope Membre
Nombre de messages : 209 Age : 35 Localisation : au coeur de la forêt Famille : Date d'inscription : 29/06/2005
| Sujet: Re: Contes de France Sam 22 Sep 2007, 15:27 | |
| Le loup de Malzeville Jeanne ne s'était jamais sentie aussi triste. Depuis son lever, elle errait dans le palais ducal de Nancy, cherchant désespérément une occupation qui pût la distraire; elle avait délaissé son ouvrage de tapisserie et son instrument de musique préféré, une épinette. Les bavardages de sa servante Perrine, qui l'amusaient le plus souvent, l'avaient aujourd'hui énervée. « Que se passe-t-il demoiselle Jeanne ? s'inquiéta la brave femme. Vous voilà aussi triste que la plaine en hiver ! Pourtant vous avez seize ans, vous êtes jolie ; votre oncle, notre bon duc René, tient à vous comme à la prunelle de ses yeux. C'est aujourd'hui le premier jour du printemps : vous devriez être joyeuse, chanter comme un pinson... - Tais-toi, sotte! coupa la jeune fille, Je ne veux plus t'entendre ! » Vexée, Perrine s'installa devant la cheminée, une corbeille à ouvrage sur les genoux, en maugréant entre ses dents. Jeanne de Vaudémont s'approcha d'une fenêtre, les yeux emplis de larmes. «Juste ment, pensait-elle, je suis jeune, je suis belle, c'est le printemps, et je suis ici, entre les murs de ma chambre, condamnée à contempler de loin la campagne ! Mon oncle craint pour moi tous les dangers, et m'interdit de sortir du palais. Je n'en peux plus!... Mais ce n'est pas une raison pour être méchante avec Perrine : allons l'embrasser ! » Entre-temps la servante s'était profondément endormie sur son ouvrage. Alors, répondant à une impulsion subite, la jeune fille se glissa hors de la chambre et quitta sans être vue le palais ducal, puis sortit de Nancy, mêlée à la foule qui en franchissait les portes. Après un long hiver, la campagne lorraine renaissait à la vie. Dans les champs, des paysans s'affairaientn s'interrompant pour regarder avec curiosité cette jeune fille richement vêtue qui se promenait sans escorte, le sourire aux lèvres. « C'est la demoiselle de Vaudémont ! » disaient-ils. Les plus hardis l'interpellèrent : « Où allez-vous, demoiselle ? Prenez garde au loup qui rôde dans le bois de Malzeville ! » Ce n'étaient pas des paroles en l'air, car les paysans de Lorraine avaient souvent affaire aux loups, qu'ils redoutaient autant que l'épidémie ou la guerre. Parfois, chassés des bois par la neige et le froid, ies farouches animaux rôdaient près des villages ; certains se risquaient même jusque sous les murs de Nancy. Pourtant Jeanne, qui avait oublié sa tristesse, continua sa promenade en fredonnant. Un tapis de primevères se nichait à l'orée du bois et les rayons de soleil jouaient entre les branches. Confiante, sans y prendre garde, Jeanne s'enfonçait au cœur de la forêt. Lorsque l'étroit sentier se perdit dans une végétation touffue, elle songea à rebrousser chemin, mais une ronce accrochée dans l'ourlet de sa jupe l'obligea à se baisser, C'est alors qu'elle entendit derrière elle un craquement, puis un deuxième, plus rapproché... Les mises en garde des paysans lui revinrent en mémoire : ,«Un loup!» pensa-t-elle. Un frisson glacé lui parcourut la nuque, elle se retourna... Ce n'était qu'un homme, mais loin de rassurer Jeanne, son aspect la paralysa de terreur : sale, hirsute, une épée à la main, un cruel sourire aux lèvres, il la dévisageait avec insolence : «Jeanne de Vaudémonî, je te tiens! s'écria-t-il. Me reconnais-tu ? Je suis Armand de Dieulouard. Enfin je peux me venger de ton oncle qui m'a banni : tu ma prisonnière. Il devra me verser une bonne rançon s'il veut te revoir ! » Éclatant d'un mauvais il marcha vers Jeanne, muette d'effroi... Soudain, elle vit son agresseur s'immobiliser, puis les yeux exorbités. D'un geste brusque, il croisa les avant-bras devant son visage... Une masse atterrit sur ses épaules, il perdit l'équilibre. A un furieux combat s'engagea entre Armand de Dieulouard et ce défenseur inattendu en qui Jeanne reconnu.... un loup ! Elle n'osait respirer. Terrassé par l'animal, l'homme se défendait de plus en plus faiblement. Quand il ne bougea plus, !e loup l'abandonna puis se tourna vers la jeune fille. Alors Jeanne ferma les yeux et perdit conscience... Un souffle tiède la réveilla. Une douce chaleur réchauffait son corps transi de froid et de peur. Elle ouvrit les yeux et eut un mouvement de recul : le loup, allongé près d'elle, la regardait, mais sans cruauté. Surmontant sa crainte, Jeanne tendit la main pour caresser l'épaisse fourrure. Lorsque le duc René et ses hommes, alarmés par la disparition de Jeanne, la retrouvèrent enfin, elle était seule. Le loup s'était enfui aux premiers bruits de voix. Non loin, Armand de Dieulouard gisait sans vie, défiguré : depuis son bannissement, ce seigneur cruel vivait caché dans le bois de Malzeville, méditant sa vengeance. Jamais Jeanne ne revit l'animal qui l'avait défendue, mais le duç René interdit la chasse au loup autour de Nancy, et on raconte qu'il fit élever dans le bois de Malzeville une chapelle que les gens du pays appelèrent "La Gueule du loup". | |
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